
On sort du cycle Scars of Mirrodin, un retour sur le plan métallique que je n'ai jamais vraiment eu dans le cœur.
Mirrodin, c'est Dominaria pervertie par le Mirari, un monde froid, artificiel, privé de la sève et de la magie qui faisaient battre le cœur du jeu.
Je préfère me souvenir de Dominaria, celle remplie d'Elfes de Llanowar, de Forêts verdoyantes et de créatures qui respiraient la vie.
À vrai dire, Magic et moi étions alors un peu en pause : entre un job étudiant et mes études à la fac de Bordeaux, les cartes dormaient.
Et puis, soyons honnêtes : Worldwake m'avait laissé un goût amer.
Ceux qui n'avaient pas mis la main sur Jace, the Mind Sculptor s'en souviennent encore — une domination totale, presque écœurante.
Bref, le feu s'était un peu éteint.
Et puis vint Innistrad
Lors de la saison des spoils du tout premier Innistrad, tout a changé.
Si vous avez lu le premier épisode, vous savez à quel point j'ai une tendresse particulière pour les mécaniques de cimetière.
Et là, au détour d'une preview, je l'ai vu.
Ce petit sorcier bleu, droit comme un i, torche à la main, prêt à redonner vie à tous les sorts du cimetière.
“Flashback is back !”
À ses côtés, je repère vite un moteur parfait pour nourrir le cimetière : Alchimie interdite.
Une carte qui demande un petit splash noir... idéal pour accueillir la toute nouvelle Liliana du Voile.
Le reste suivra naturellement : Think Twice, un sort de réanimation, sacres de déterrement ...
Le puzzle prenait forme sous mes yeux.
L'étudiant, les cartes et le prêt
Je n'ai pas résisté. J'ai détourné une partie de mon prêt étudiant pour m'offrir non pas un, mais deux displays du bloc Innistrad.
(Si j'avais déjà rencontré Léo de Relic à Toulouse, je crois que j'y serais passé tout entier et que je serais aujourd'hui à la tête d'un petit empire du jeu organisé !)
Ricardo, le boss de Difintel, n'a jamais été aussi accueillant avec moi, et pour ceux qui le connaissent, Ricardo l'accueil il connait. Me voila reparti avec mes deux boîtes sous le bras.
Le trajet de retour, du centre de Bordeaux jusqu'à Pessac,en tram a l'époque, m'a paru interminable.
La première boîte ? Une débâcle. Un seul Snapcaster, pas d'Alchimie interdite.
Mais la deuxième... le mimi, le rara le miracle : deux Snapcaster Mage, une Liliana du Voile, une Olivia Voldaren, une Garenne de Kessig, deux Cimetières marins, de la foil à gogo.
Un trade improbable avec David, alors président de Bordominaria, me permettra de compléter le carré de Snap.
J'étais au paradis.
Comme un horloger devant ses pierres précieuses
Ces quatre Snapcaster, je les ai contemplés comme on contemple une montre neuve.
Leur design parfait, la puissance contenue dans ce regard.
Et surtout, ce détail que j'adore : ils sont issus du Magic Invitational, ce programme où le vainqueur dessinait sa propre carte.
Un peu comme Meddling Mage... mais ça, c'est une autre histoire.

Le retour du contrôle : Solar Flare
Avec ce trésor, je monte un Solar Flare, archétype Esper contrôle bien lourd.
Le plan de jeu ? On contre, on fait défausser, on gère... et on pose — ou on réanime — un Titan solaire qui ramène une Image phantasmatique.
Qui, elle-même, devient un Titan solaire.
Qui ramène Liliana, un Snap, un Cercle de l'oubli... bref, n'importe quel permanent à trois manas ou moins, terrains compris. Coucou quartier fantôme
Un deck lent, exigeant, mais d'une élégance folle.
Les wincons alternatives ? Sphinx consacré, Elesh Norn grand cenobite, Wurmcoil Engine, Battecrâne... la belle époque.
Avec la sortie d'Obscure ascension, l'arrivée du Pillage sans foi rendra la fête encore plus belle.
Et comme si cela ne suffisait pas, l'année suivante verra débarquer l'Ange de la restauration , comme si jouer quatre mages ne suffisait pas !
Une vraie époque bénie, où chaque extension semblait écrite pour faire plaisir à ceux qui aimaient réfléchir avant d'attaquer.
Je me souviens encore d'un miroir épique, au fond de la cave de Difintel, joué jusqu'au bout des cinq tours additionnels.
Un match haletant, d'une tension incroyable.
Un de ces moments où Magic redevient ce qu'il a toujours été pour moi : une expérience.
Un mage pas comme les autres
Le Snapcaster Mage, c'est une carte qui fait tout à la vitesse de l'éclair.
Défenseur ou attaquant surprise, il entre en jeu, redonne vie à un sort du cimetière et repart, souvent en laissant l'adversaire bouche bée.
Moins cher qu'un Témoin éternel, le flash en plus, et surtout jouable dans presque tous les formats : du Standard au Legacy.
Sa seule faiblesse n'est pas la sienne, mais celle du cimetière : sans souvenirs, il n'a rien à rappeler.
Et tout ça, sans être une mythique, mais une simple rare !
Un modèle d'équilibre et d'ingéniosité, comme on en voit peu.
Le Mage et l'Ombre
Le Snapcaster Mage m'aura accompagné bien au-delà du Standard.
Il a rejoint mes decks Modern, où il se glisse encore parfois aux côtés de ma Death's Shadow, ou dans certaines versions Domaine.
Mais au-delà des formats, il a laissé une trace durable et même culturelle.
Il n'est pas seulement une carte. Il est devenu une icône.
Combien de joueurs se sont identifiés à ce petit mage, lampe à la main, prêt à ressusciter leurs sorts préférés ?
Le voir, c'est se rappeler cette sensation d'intelligence tactique, cette joie de “faire plus” avec les mêmes ressources.
Son influence a dépassé le jeu lui-même.
Des podcasts comme "The Podcaster Mage" lui rend hommage dans son nom, preuve que ce personnage a marqué une génération entière de joueurs, celle qui a grandi en maniant le Cantrip , le counterspell et le tempo.
Et que dire de ces inscriptions cultes, imprimées sur des t-shirts, des tapis de jeu ou des sleeves :
“Bolt – Snap – Bolt”, l'expression d'un rêve de joueur bleu-rouge, la signature d'une époque où Magic se vivait en séquences parfaites.

Le Snapcaster, c'est un état d'esprit.
Une façon de jouer, de penser, de se souvenir.
Une carte qui a uni des archétypes, des formats, et des joueurs d'horizons très différents.
Et pour moi, elle restera toujours ce moment précis où Magic est redevenu une passion, ce retour de flamme qu'on n'attend plus, mais qu'on accueille avec le sourire d'un vieux compagnon retrouvé.
