Innistrad : chasse de minuit - Survivants - Magic the Gathering

Innistrad : chasse de minuit - Survivants

Innistrad : chasse de minuit - Survivants

Torens, marchand peu recommandable, n’a d’autre choix que de faire face à son passé, tant en redevenant qu’un héros, qu’en étant mis face à ses manquements.

  La storyline de Magic / Innistrad : chasse de minuit

Torens, marchand peu recommandable, n’a d’autre choix que de faire face à son passé, tant en redevenant qu’un héros, qu’en étant mis face à ses manquements.

  La storyline de Magic / Innistrad : chasse de minuit



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le , par Drark Onogard
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Torens, marchand peu recommandable, n'a d'autre choix que de faire face à son passé, tant en redevenant qu'un héros, qu'en étant mis face à ses manquements. Vous trouverez l'article original ici.

Survivants



« Bonnes gens de... » commença Torens, mais il s'arrêta peu après quand le nom du village lui échappa. Pendant ces deux années, de gagner de l'argent lui avait demandé de circuler dans tous les hameaux isolés d'Innistrad, pour manger le même poulet rôti pendant une semaine, en évitant des portions de route où des choses horribles rôdaient en quête d'une proie facile. Garder la trace d'où il était était devenu plus dur encore quand tous les jours se fondirent en une seule nuit sans fin. « Bonnes gens, recommença-t-il, ce sont des temps difficiles, et les temps difficiles requièrent des choses... difficiles. »

Et merde. La demie-journée supplémentaire de voyage sur la frontière entre la Stensie et Kessig – grâce à une cathare plutôt zélée du nom d'Ingrid qui le chasse sans cérémonie de Silbern, son lieu de vie préféré – avait rendu les mots fourbes et glissants. Rassemblant ses esprits, il se déplaça vers le contenu de son chariot, prêts à être exposés. Le haut en toile avait été tiré sur les arceaux du chariot avec les mots « Les biens étranges de Torens » peints à l'intérieur du tissu. Dans le chariot reposaient des poubelles en osier remplies d'une foule d'articles divers, tous à un prix raisonnable et étiquetés avec précision.

Avec une précision raisonnable.







« Vous avez un problème avec les loups-garous ? demanda Torens dans la foule, cherchant dans un des paniers pour en tirer une petite bouteille marron. J'ai une solution contre les loups-garous. » Il n'avait jamais eu de plainte à propos de son sérum anti-lycanthrope – principalement parce qu'il ne restait jamais bien longtemps pour les écouter.
« Qu'en est-il des malédictions de sorcières ? continua-t-il, plongeant sa main dans un autre panier pour révéler un collier agrémenté d'os de chauve-souris. Portez ça, et vous serez protégé contre les maléfices, garanti. Et puis, c'est sacrément fashion. »
« Vampires ? » Quelques visages dans la foule s'illuminèrent de reconnaissance. Torens sortit un petit miroir d'argent, sale et couvert de poussière, ainsi qu'une boîte plate de sa poche arrière. Il badigeonna tout le miroir du contenu visqueux de sa boîte, et après l'avoir essuyé un coup avec sa manche de tunique, il tourna le verre sans tache vers la foule. « Les vampires peuvent avoir l'air de n'importe qui, se fondre dans la brume, se transformer en chauves-souris ! Mais vous pourrez toujours les remarquer avec ça – le Vernis Clairvoyeur de Torens ! Allez, ne courez pas tous en même temps vers moi. »

Ce ne fut pas le cas. Des railleries et des gloussements vinrent plutôt.

« Mesdames, messieurs ! » appela une voix, coupant court au rire. L'homme qui avait parlé avança, séparant la foule comme un roi de retour. « Nous avons si peu de visiteurs dans notre humble village. Si vous ne montrez pas de respect à notre hôte, alors rentrez chez vous. » La foule répondit avec des murmures mais pas de protestations, alors qu'elle se dispersait. L'homme se présenta : « Je suis Vytas. Permettez-moi de m'excuser pour le comportement des gens de Traublassen. Ce sont des gens simples.
- Bien. Le message est clair. Je reprends la route.
- Monsieur, je ne veux pas que vous partiez. J'ai une mission conforme à une homme de votre talent. Du genre qui paye. »

Hm. Un boulot payé aiderait bien à laver le goût amer de cette journée. Mais franchement, il ne pouvait supporter d'être dans à proximité de Vytas, sans parler de travailler pour lui. La robe de cet homme criait sa prétention à la haute couture : une tunique de lin doublée de soie et de velours, le tout brodé d'or fin. Pire encore, son ton haut-et-puissant, comme un seigneur qui nourrit son porc de morceaux de choix avant de dire au boucher d'y aller.

« Je passe mon tour, dit Torens.
- L'offre est plutôt généreuse, rétorqua Vytas. Je doute que ceux qui vous cherchent fassent un aussi bon marché. Il serait honteux que quelqu'un les aide dans leur recherche, poursuivit-il en tapotant la carriole de Torens. C'est assez remarquable, la vitesse à laquelle des cathares déterminés, à dos de cheval, comparé à celle de quelqu'un qui tire un poids mort comme celui-ci.
- Qu'est-ce que vous voulez ? grogna Torens.
- Que vous écoutiez. Venez. Nous parlerons dans mon étude. »



Torens et Vytas traversèrent le village jusqu'au manoir de Vytas. Des colonnes d'albâtre dominaient la façade, et les douzaines de fenêtres indiquaient au moins autant de pièces. Alors qu'ils approchaient, Torens remarqua un jeune homme debout devant la porte centrale. Vytas lâcha un grognement ennuyé en descendant de la carriole.

« Aleksandar, dit Vytas, il se fait tard. »

Bien qu'il fût plus grand d'une bonne tête que Vytas, Aleksandar était un fouillis de genoux et de coudes sous une serpillière blonde en désordre. Dans quelques années, conjectura Torens, il remplira son habit. Mais d'ici là il aura le charisme d'une nouille dans une soupe de la veille.

« C'est à propos du loyer, Monsieur, répondit Alexandre qui fit un pas de côté en même temps que Vytas pour rester face à lui. Donnez-nous une semaine de plus. Mon père a quelques contrats qui arrivent, et...
- Ce n'est ni le moment ni l'endroit.
- Pourquoi non ? demanda Torens qui les rejoignit sur le pas de la porte. Donnez un sursis au petit. »
Vytas se rapprocha de Torens. « Ces affaires n'ont rien à voir avec les nôtres.
- Je vous comprends bien. Pourquoi ne faites-vous pas la même chose pour lui ? »
Vytas se racla la gorge mais garda sa contenance.
« Aleksandar, toi et moi nous pourrons discuter de ces choses-là après que mes affaires avec cet homme sont réglées. Pendant ce temps, emmène sa carriole aux étables. » Vytas se dressa dans sa tunique, serra son manteau, et rayonna d'un grand sourire en direction de Torens. « Nous y allons ? »

Le manoir de Vytas était aussi démonstratif que l'hôtel particulier le plus exquis de Thraben autrefois. Avant les Calamités, Torens avait servi comme garde de mausolée ; les tâches qu'il appréciait le moins étaient les appels chez des aristocrates nerveux qui juraient qu'un de leurs morts s'était levé de sa tombe pour récupérer leur héritage. En général, il s'agissait du chat – sauf une fois. Accueillant Torens dans le foyer de Vytas, une sculpture de bronze représentant une meute de loups courant dans une prairie. Plus en haut, de chaque côté d'une grande arcade, étaient suspendues deux peintures : l'une de Vytas lui-même, avec une généreuse touffe de cheveux sur le haut de son crâne, et l'autre d'un homme barbu dans une tunique et une coiffe noires, une paire de binocles très épais sur le bout de son nez.

« Mon arrière-grand-père, Taivas, proclama Vytas. Il fonda Trausblassen avec seulement une vision et sa passion de la chasse. »

Torens suivait Vytas à travers des couloirs ornés de diverses œuvres d'art, jusqu'à ce qu'ils arrivassent dans une pièce dominée par un bureau de bois noir recouvert de papiers, de plumes, et d'un verre décanteur. Vytas versa deux verres de vin.

« C'est quoi le boulot ? demanda Torens en ignorant le vin que Vytas lui tendait.
- Vous n'êtes pas du genre à être fort en politesses, n'est-ce pas ?
- Les menaces n'aident pas vraiment à la première impression.
- Des menaces ? répéta Vytas en s'enfonça dans son fauteuil de bureau en cuir. C'est mon travail de savoir qui entre et qui sort de ma ville. J'ai de nombreux contacts dans l'Église. Une information peut voyager vite, si on lui en donne les moyens et la motivation. Une arme enchantée d'une rune est une petite motivation pour vos amis cathares, comme l'appréhension du frère-devenu-voleur qui s'est carapaté avec.

Torens restait silencieux. Que savait donc exactement Vytas ?

« Du calme. Je n'ai pas de part dans vos querelles familiales, continua Vytas. En fait, je sens une bonne âme en vous, malgré ce qu'on m'a dit. Vous vous portez avec une certaine noblesse qui, je crois, surpasse les quelques problèmes qui contaminent votre passé.
- Venez-en aux faits.
- Certes. Vous avez pris note sans nul doute des gens de cette ville. Ce sont des gars vigoureux. Mon arrière-grand-père s'est assuré de cela. Il a formé des alliances, utilisé sa richesse pour encourager l'arrivée de plus de pionniers et garantir leur sécurité.
- La sécurité de ses locataires.
- Il a pris ce risque, je le sais bien. Je fournis des graines, des soins, des armes pour la sécurité du village. Certaines mesures compensatoires sont une attente raisonnable, poursuivit-il avant d'arranger quelques uns des papiers de son bureau en une belle pile. Cependant, personne n'est parfait. Récemment, quelques rapports me sont arrivés en privé à propos de bruits étranges émanant du donjon qui surplombe le village.
- Un donjon ? répéta Torens, qui ne se souvenait pas d'avoir vu une telle structure sur son chemin.
- Avec les ténèbres qui grandissent, il peut être complexe de le discerner se découper sur l'horizon, reconnut Vytas. Selon les rapports, le bruit est un cri très léger. Ce pourrait n'être qu'un animal blessé, mais c'est mon travail de m'en assurer.
- Personne n'avait l'air très inquiet sur la place du village.
- Sauf votre respect, vous êtes un étranger. Ils ne vous font pas confiance comme ils me font confiance.
- Confiance. Bien sûr. C'est ce que j'ai vu sur cette place. »
Vytas émit un rictus à la pique de Torens. « Vous explorerez le donjon. Si vous trouvez quelque chose qui n'est pas ordinaire, vous vous en occuperez. Discrètement, cela va de soi.
- Cela va de soi, renifla Torens. Vous m'avez bien eu.
- Difficilement. La récompense vaudra assurément votre temps. » Vytas tira l'un des tiroirs du bas de son bureau, sortit une petite boîte, et leva le couvercle pour révéler qu'elle était remplie de parfaites pièces d'or, qu'il plaça en piles sur son bureau. « Vous aurez l'autre moitié lorsque la mission sera accomplie. »

Torens prit une pièce afin de l'étudier. Il la compressa entre ses doigts, la rapprocha de la lanterne de Vytas, la renifla même. C'était une vraie. Et cinquante au total pour tout le travail ? C'était assez pour qu'il soit installé confortablement pendant plus d'un an. Finalement, ce marché ne semblait pas si mal, malgré la coercition de Vytas et la révulsion qu'avait Torens de travailler pour quelqu'un de si gluant.

« Alors, le sortit-il de ses pensées, marché conclu ?
- Je n'ai pas vraiment le choix, non ?
- Il y a toujours un choix, rétorqua Vytas. Seulement certaines options sont préférables à d'autres.
- Bien, à part pour une chose, dit Torens, faisant glisser les pièces dans sa main. De combien est le loyer du garçon ?



Les vendeurs sur la bien connue place du marché de Hanweir partageaient leur temps entre empaqueter leurs articles et expédier les achats de dernière seconde des clients pour éviter une averse à venir. Le brouhaha était une distraction parfaite pour que Torens glisse ses mains dans des poches non gardées et revienne avec quelques pièces. À douze ans, ses doigts étaient petits et précis – parfait pour chaparder çà et là pour remplir subrepticement les coffres familiaux – tant qu'il était un peu couvert.

Se baladant au milieu des enclos à bétail, il remarqua le signe parfait : un homme richement vêtu flanqué de deux serviteurs qui tenaient leurs manteaux au-dessus de sa tête, profondément enfouie dans les négociations avec un fermier qui vendait ses poulets. L'un des serviteurs remua une seule pièce d'or au visage du fermier tandis que l'homme richement vêtu maintenait sa phrase : « Une pièce pour le tout ! À prendre ou à laisser ! »

De l'or ! Torens n'en avait jamais vu dans la vraie vie. Sa mère, une blanchisseuse, recevait ses salaires en cuivre. Quant à son père forestier, il devait être payé occasionnellement en or, mais seulement quelques pièces d'argent survivaient à ses paris gorgés de bière sur les courses de tortue à la taverne du Lac Perdu. Même deux ou trois pièces seulement auraient pu nourrir toute la famille pour plusieurs semaines.

Il commençait à crachiner. Se tenant droit, Torens avança parmi la foule de gens qui sortaient du marché. Il se fraya un chemin jusqu'à l'endroit où l'homme richement vêtu et sa cohorte se tenaient et, cherchant la fenêtre de tir, il sortit son bras et plongea deux doigts dans la poche ouverte du serviteur, sortant deux de ces pièces précieuses. Il sortit son bras avec sa rançon et prit un instant pour regarder ce qu'il avait tiré.

Ce fut l'instant de trop. Les serviteurs remarquèrent Torens, et tandis que le garçon s'efforçait de fuir leur poigne, ils se mirent à sa poursuite. Malheureusement, la foule qui lui avait donné son couvert entravaient à présent sa fuite, et ce ne fut pas longtemps après qu'il sentit des mains saisir ses bras, d'autres lui tenir le cou. Il fut tiré jusqu'à l'étal du marchand. L'attendait se tenait l'homme richement vêtu, son visage rouge poivron habité par un regard furieux.

« Sacré petit con ! s'exclama-t-il. Sais-tu bien ce qui arrive aux chapardeurs comme toi ? Vous disparaissez. Parce que vous êtes inutiles, vous ne méritez le soin de personne. »

Soudain, Torens sentit l'un des serviteurs le lâcher. Il se tourna à temps pour le voir projeté dans une caisse de poisson. L'autre serviteur bondit sur ses pieds, seulement pour recevoir un coup de poing bien placé dans la gorge. Une ombre énorme surplombait l'homme richement vêtu qui, se trouvant seul, tomba en arrière sur le sol boueux.

« Qu... Qu'est-ce que ça veut dire ? » bredouilla-t-il.

Torens se leva, sourit, et s'approcha de son sauveur. Son grand frère Elamon, qui dominait d'une tête et demie tout le monde dans le marché. Avant que Torens pût le fêter, Elamon attrapa les pièces et les jeta comme une aumône à l'homme embourbé.

« Ne touche plus jamais à mon frère, le prévint Elamon. Allez, dégage. »

Se remettant précipitamment sur leurs pieds, le riche et ses serviteurs rassemblèrent la monnaie et fuirent.

Attrapant Torens par le col, Elamon le tira sous un préau pour échapper à l'averse.

« Je serai pas toujours là pour te sauver la peau, lui rappela-t-il.
- Comme si t'étais un héros ! cria Torens. J'avais pas besoin d'être sauvé !
- Combien de fois est-ce que je t'ai sorti du pétrin ? J'en ai perdu le compte.
- On avait besoin de cet argent ! rétorqua Torens, qui n'avait rien à lui répondre.
- Pas comme ça.
- Mais...
- Assez ! » Elamon pointa un doigt contre la poitrine de Torens, ce qui le colla au mur. « On rentre à la maison. »




Au plus profond de la nuit, avancer seul dans l'inconnu était un choix que ne faisaient que les têtes brûlées et les désespérés ; ainsi, Torens ne protesta pas quand Vytas lui offrit que son fils, Boris – costaud et taciturne, avec une mâchoire d'enclume et le charme d'une autre enclume, un peu plus lourde – soit son guide.

« Tu pues la ville, » dit Boris avant les présentations. Torens renifla l'intérieur de son col. On ne l'aurait pas confondu avec un bouquet de fleurs, mais au moins il ne sentait pas une journée chargée à l'abattoir. La majorité de l'argent de Traublassen était le produit du commerce de peaux et de fourrures, et le chef de ces corporations de chasseurs était Boris.

Cela faisait bien longtemps que le donjon n'était plus une structure protectrice. Après avoir traversé un pont qui passait par-dessus des douves asséchées et sous une barbacane en ruines, Boris et Torens arrivèrent dans une petite cour. Peut-être que ce fut autrefois un jardin verdoyant, mais tout ce qu'il en restait à présent était des pots en pierre vides sur de la poussière et des éboulis. Ils traversèrent le sol aride et approchèrent d'une grande porte d'acier noir, ornée d'une sculpture d'escouflenfer.

« Mon arrière-arrière-grand-père Taivas a fait cette porte, dit Boris en la caressant comme un animal. C'était un visionnaire, un génie. » Plaçant la lanterne par terre, il sortit de sa poche de ceinture une sphère de laiton de la taille de son poing et la plaça dans le creux d'un des yeux du dragon. Les bruits graves des engrenages tournant contre la pierre suivirent, et la porte s'entrouvrit.

Soudain, son sourire orgueilleux s'évanouit et, dégainant un long couteau, Boris se précipita vers la barbacane. Torens regardait au-delà de la lumière de la lanterne. Il ne vit rien mais entendit des bruits de lutte, le poussant à chercher dans sa sacoche la poignée couverte d'acier de son arme. Il la relâcha quand Boris revint avec Aleksandar, le jeune homme de tantôt. Il était sorti de ses habits de travail pour enfiler une armure d'archer qui lui seyait, le cuir solide aux coudes craqué. Se pendait à sa ceinture une épée dans son fourreau.

« Pourquoi est-ce que tu nous suis ? » demanda Torens.
- Je veux vous offrir ma protection pendant que vous explorez le donjon, répondit le garçon. C'est une question d'honneur. Vous avez payé le loyer de ma famille.
- De l'honneur et une boîte de poisson pourri ne te donneront rien d'autre que des maux d'estomac, rétorqua Torens. Si tu es chanceux.
- Ecoute le bon sens, mon gamin, se moqua Boris. Retourne chez tes parents et assure-toi que le loyer du mois prochain arrivera à temps. À moins que tu veuilles encore faire des courbettes ? » À en juger par l'expression abattue d'Aleksandar, la réponse était non. Le gamin avait peut-être des tripes, mais il n'avait pas les muscles pour soutenir ce courage. Au moins le savait-il. Satisfait de lui-même, Boris tourna son attention vers Torens. « Je vais fermer la porte derrière toi – pour la sécurité de la ville. » Il désigna du doigt une petite fenêtre au deuxième étage. « Quand tu as fini, allume une lumière, et je te ferai sortir. »

Torens acquiesça et rentra. Puis il se tourna vers Aleksandar.

« Tu viens ou quoi ? »

Un sourire fendit le visage d'Aleksandar qui se précipita aux côtés de Torens.

« Ta tombe, » grommela Boris tandis qu'Aleksandar le bousculait. Il ferma et verrouilla la porte derrière eux.

Torens, Aleksandar le suivant, marchaient dans le hall silencieux. Des éclats de tuiles de pierre et des morceaux de maçonnerie effondrée se broyaient sous leurs pas. Les bruits de petites griffes grattant le sol venaient de l'intérieur, à la limite de la lumière. Vers la fin du corridor se tenait une porte qui s'ouvrait sur un espace plus large de l'autre côté.

« Monsieur ? l'interpela Aleksandar. Pourquoi avez-vous changé d'avis là-bas ? »

Torens ne répondit pas immédiatement. Il analysa la frontière de la lumière en vue de signes plus grands de mouvement parmi les ombres et progressa ensuite jusqu'à la porte. Tendant sa lanterne à l'intérieur de la pièce devant eux, il devina que c'était le hall principal du donjon, à en juger par sa taille. À l'extrême fin du hall se trouvait un escalier en torsades qui montait vers une mezzanine dominant le sol. Cet endroit avait pu être autrefois celui de festins ou de rencontres d'importances entre des dignitaires puissants, mais rien ne restait de cette opulence.

« Je hais les moqueurs, dit Torens en faisant signe à Aleksandar d'avancer. Et je hais particulièrement celui-ci. » Il s'agenouilla, posant sa sacoche sur le sol. Puis il y plongea sa main pour en sortir la poignée de son arme. Des picotements électriques montèrent son bras. « C'était quand même une erreur de nous suivre.
- Je vous ai dit pourquoi je l'ai fait. Vous avez payé...
- Ce n'est rien.
- Ce n'est pas rien, rétorqua Aleksandar. Ma famille tient une forge. Sans le soleil, les plantations ne poussent pas, et pas de plantations veut dire pas besoin de nouveaux outils ni de réparer les anciens. On est chanceux que je m'occupe des étables de Vytas pour un peu plus d'argent, mais on ne peut se serrer la ceinture que jusqu'à un certain point. Vous nous avez sauvés.
- Je n'ai sauvé personne, » affirma Torens. Il regardait le sol, cherchant à changer de sujet, avant de remarquer le fourreau à la ceinture d'Aleksandar. « Voyons voir ton épée, gamin. » Le garçon dégaina une lame à l'air robuste et la tendit à Torens, qui évalua son équilibre sur ses paumes, ainsi que son poids. « C'est du beau travail, » nota-t-il en rendant l'épée. Cela n'importait pas que la facture soit simple et la poignée sobre. « Tu sais t'en servir ?
- Ma mère m'a donné quelques leçons. Elle a grandi dans Estwald, où son père était capitaine de la garde. Elle m'a montré quelques passes.
- Ta famille m'a l'air assez soudée. La mienne était pas trop câlins et bisous.
- Ça a toujours été nous trois. On prend soin les uns des autres. »

Un cri perça le silence, un cri humain.

« Ça vient de là-haut ! s'exclama Aleksandar tandis qu'un autre cri retentissait. Viens ! » L'épée en main, il grimpa les escaliers quatre à quatre. Torens tira la masse de sa sacoche, noyant la pièce d'une lumière éclatante de blancheur. Se précipitant dans les escaliers, il atteignit l'étage à temps pour voir Aleksandar défoncer la goupille qui verrouillait la porte et charger.



La nuit était pleine de rire, le clapotis de la bière incontestablement diluée qu'on verse dans les coupes, avant que son ambre pâle n'éclabousse les tables. Le pub de Jorelda était le dernier lieu que Marguerite, l'une des bardes les plus célébrées de Gavonie, appréciait. Il s'avérait que des aspirants nobles mêlés à des ruffians appréciaient les chants grivois, même si le mandoliniste éméché qui l'accompagnait manquait un accord sur trois.

Torens leva une pinte jusque sa bouche avec une main maladroite. Son contact était en retard. Ça lui avait pris une bonne partie du mois d'organiser la cargaison de bézoards, de talismans, d'herbes rares, et d'autres objets déclarés comme de la contrebande par le conseil de la ville. Le bannissement affectait assez peu la demande. Des rumeurs venant de hameaux autrement plutôt pacifiques fixaient des affiches concernant des voyageurs disparus non à cause de bandits de grand chemin désespérés, comme le disaient les autorités, mais à cause de créatures plus terribles. Quelle que fût l'histoire – une hurlemeute de dix-mille membres, des monstruosités ailées qui s'assemblaient à Cendregueule, ou d'autres cauchemars concoctés – cela renforçait la peur dans la population, et les marchés si fertiles étaient désertés.

Tout ce dont Torens avait besoin était un marché pour s'en sortir. Ne plus avoir à éviter les percepteurs de dettes, qui avaient appris à attendre jusqu'à ce qu'Elamon soit éloigné pour soutenir leur mère. Le butin suffirait à acheter une maison et à s'assurer qu'il y ait toujours à manger sur la table. Tout ce qui restait était de rencontrer cet homme nommé Rogel pour finaliser le marché. Malheureusement, Torens avait négligé d'obtenir la description de Rogel, ce qui le laissait assis au bar, concentré sur sa boisson.

De nulle part, deux pattes d'ours saisirent ses épaules et les secouèrent.

« Petit frère ! » Elamon, sentant l'armure ointe et la sueur, s'assit à côté de Torens et commanda une bière. Nombreux furent ceux qui dans le bar détournèrent leur attention momentanément de Marguerite pour observer Elamon avaec admiration, désir, ou peur. Il était devenu comme une célébrité locale, grâce à sa part dans le dénichement d'un loup-garou parmi les rangs de ses camarades de la garnison. Les bonnes gens levaient le poing pour lui rendre honneur. Les hors-la-loi se glissaient dans leurs sièges et se précipitaient au-dehors. « Je ne m'attendais pas à te voir ici !
- La même, dit Torens tout en cherchant des issues. T'es pas du genre à traîner dans ces endroits.
- Un contact nous a informés qu'une sorte de marché allait se passer ici cette nuit. La semaine dernière, on a intercepté toute une caisse de doigts arrachés, des centaines, chacun marqué comme le divin index de Saint Traft lui-même. Tu le crois ? »

Torens le pouvait. Il n'était pas impliqué dans le marché mais connaissait les gens qui l'étaient. Ils avaient commencé à se cacher maintenant que les usuriers qui leur prêtaient de l'argent venaient récupérer ce qui leur était dû en monnaie ou en sang, selon ce qui était le plus facile.

« Je pensais que vous étiez une garde, pas une fédération du commerce.
- J'ai essayé de le dire au Capitaine Lysandra. Elle a répondu en m'envoyant dans cette chasse au trésor.
- Amuse-toi bien avec ça. Moi je vais y aller.
- Pas si vite, le coupa Elamon en le forçant à s'asseoir de sa main sur son épaule. Ça fait combien de temps qu'on ne s'est pas reposé et qu'on n'a pas parlé ensemble ? »
Merde. Pourquoi est-ce que ça ne pouvait pas être simple ? « Voyons voir... J'ai 21 ans, alors... 21 ans. »
Elamon prit une longue gorgée et acquiesça. « Je ne m'attends pas à ce que tu comprennes. » Il était différent de ce dont se souvenait Torens – plus morne, les yeux fixés dans la couche d'écume sur sa boisson. « Tu traînes toujours avec tes amis sur les docks ?
- Ouais. » Des amis ? Plutôt des complices. Après que son père fut mort il y avait deux ans de ça, faisant d'Elamon l'homme de la famille, le règne de l'ordre vint rapidement. Un couvre-feu. Pas de boissons dans les débits locaux. Une liste toujours plus longue de « voyous » auxquels Torens n'avait pas le droit de s'associer. Leurs disputes nocturnes faisaient rarement plus que d'agiter leur mère, elle-même alitée et malade. Deux mois de cela, et Torens en avait eu assez. Il était parti dans un taudis ironiquement peuplée du genre de gars qu'Elamon plaçait sur la liste. Cependant, Torens les sentait comme les siens, ceux qui comprenaient qu'à moins de s'extirper du trou, on se fait bouffer. Pas de demie-mesure, pas de place pour des principes quand la survie était en jeu.
« M'man demande ce qui t'arrive. Elle met toujours le couvert pour toi.
- Non, dit Torens. Tu sais ce qui arriverait si je revenais à la maison.
- Tu pourrais au moins t'arrêter un de ces jours pour le voir. La nuit dernière... » La voix d'Elamon s'étrangla tandis que son regard passait de Torens à un autre point dans la salle. Tournant la tête, Torens remarqua exactement ce que son frère regardait – juste à l'intérieur de la porte l'homme décharné qui ressemblait plus à un lapin perdu qu'à un client de bar typique. Il ne se serait plus démarqué que s'il avait été en feu. Elamon se leva et laissa quelques pièces de cuivre sur le bar. « Achète-nous une autre tournée. Je reviens. »

Torens ne savait pas si c'était Rogel qui venait d'entrer, mais il n'aurait pas d'opportunité.

« Elamon ! l'appela-t-il.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Pour ce que ça vaut, je comprends bien. Merci de toujours garder un œil sur moi. » Torens serra ses doigts autour de la hanse de sa pinte. « Je suis désolé. » Avec ça, il leva la pinte et balança son contenu au visage d'Elamon, profitant de ce moment pour fuir au-delà de son frère, fendre la foule, traverser la porte. Il devait se rendre en sécurité, et vite. Torens se glissa dans une rue malfamée entre deux magasins et émergea sur une petite allée, tortueuse, avec l'intention d'y pénétrer avec le reste des buveurs nocturnes. Un bon plan, mais ce n'était pas censé l'être.

« Stop. » Elamon s'approchait de l'intersection au loin, arbalète chargée. « Pourquoi, Torens ?
- Tu sais pourquoi, répondit-il.
- Chaque jour, je travaille pour aider notre famille ! Pour obtenir du respect ! C'est comme ça que tu survis !
- Du respect ? De qui ? Du capitaine qui se fout de toi ? Du conseil ? Ils sont trop occupés à siroter du bon vin pendant que les caravanes sont massacrées sur les routes. On est rien pour eux. On a aucune importance à moins de nous tirer d'affaire nous-mêmes.
- Non, le coupa Elamon qui jeta son arbalète comme il se trouvait à quelques pas. Il y a une bonne manière de faire les choses.
- Ça inclut de m'arrêter ? »

Elamon s'élança vers son frère, mais Torens esquiva agilement chaque tentative. Elamon avança dans une autre tentative d'étreinte ursine, mais Torens l'évita de nouveau. Son frère retenait ses coups – Torens pouvait le sentir. Même malgré l'armure qui l'alourdissait, Elamon était plus rapide que cela. Si les circonstances impliquaient seulement de convaincre Elamon de cesser le combat, peut-être qu'il y avait d'autres options pour Torens que de fuir. Mais la clémence de son frère, causée par l'amour ou son cœur brisé, ne l'aideraient pas à se débarrasser du reste de la garde qui déferlerait bientôt dans la zone autour du pub.

Torens attendit qu'Elamon tente de nouveau de l'attraper. Cette fois, il feignit un coup de poing, déséquilibrant légèrement son frère. C'était l'ouverture dont il avait besoin pour fuir et se perdre dans les allées tortueuses de Hanweir avant de sortir de la ville.




Trop en retard pour arrêter Aleksandar, Torens se lança au-dessus du seuil. Les ténèbres de l'autre côté étaient épaisses, étouffantes – la fumée aussi dense que les ténèbres. La lumière de sa masse, qui avait été une bénédiction, éclaira la fumée, l'entourant d'un halo de gris indistinct.

« Aleksandar ? » appela-t-il.

Une série de renâclements et de sifflements lui répondirent, qui semblaient venir de partout, et puis, s'élevant à quelques centimètres de lui, une main griffue tenta de lui arracher le visage. Il parvint à éviter en reculant et chassa la griffe avec sa masse, faisant gémir la créature de douleur. Torens revint en position défensive seulement pour marcher en direction de deux griffes de plus lui lacérant la jambe. Il mit un genou à terre, remarquant une rafale de pieds à trois orteils frappant le sol sous le nuage de fumée.

« Aleksandar ! Où es-tu ? » Il revint sur ses pieds et resta au même endroit, attendant quelque chose de charnu – tête, corps – à attaquer. Aucun ne vint. Plutôt, la fumée se dissipa, permettant à la lumière de la masse de Torens d'imprégner graduellement la pièce. La première chose qu'il remarqua fut l'épée d'Aleksandar sur le sol à côté des restes brisés de la lanterne de Boris. Il se pencha pour prendre l'épée, lâchant chaque malédiction qu'il avait jamais apprise.

« Torens de Hanweir, » dit une voix de femme derrière lui. Il se retourna avec la masse et l'épée prêtes à frapper, seulement pour faire face à quelque chose – quelqu'un – de complètement inattendu. Poussé dans le coin de la pièce se trouvait un lit miteux et, sur lui, une femme en chemise de nuit, les couvertures enroulées autour d'elle alors qu'elle se blotissait contre le mur de pierre. Avait-elle été là tout ce temps ?







« Comment connaissez-vous mon nom ? Qu'est-ce qui se passe ?
- Les diables ont apporté le garçon à leur maître. »

Des diables. Bien. Et leur maître démon. Doublement bien. Torens avait un peu d'expérience avec les zombies et les goules en tant que garde du mausolée, mais les démons étaient réservés aux Chapelains de la lande qui se spécialisaient en exorcisme, ou les Sagelances adeptes d'incinération d'engeances à la flamme angélique. La meilleure chose qu'il puisse faire était d'insulter ces choses et puis de mourir.

« Je m'appelle Eruth. » Elle tira les couvertures du lit pour révéler des manilles qui l'attachaient au mur par les chevilles. La peau sous le métal était cloquée et arrachée. « Je suis prisonnière des chasseurs, comme vous.
- Des chasseurs ? demanda-t-il.
- Ces hommes qui puent la viande fraîche qu'on fait sécher. »

C'était donc le piège. Vytas et Boris et peut-être toute cette putain de ville étaient un groupe de cultistes, et Torens et Eruth étaient le plat principal de leur seigneur démon. Torens promit que, si jamais il rencontrait Boris de nouveau, il verrait comment cette brute au parfum de fosse à purin apprécierait quand le génie visionnaire de son arrière-arrière-grand-père lui tomberait sur la tronche.

« Laissez-moi vous retirer ça, » dit Torens. Il étudia les chaînes attachées aux chevilles d'Eruth. Elles étaient épaisses et solides, mais au moins elles n'avaient pas l'air imprégnées de magie. Un peu d'huile de coude et le bon angle, et il pourrait tordre les manilles assez pour glisser ses pieds hors de leur emprise. « Vos jambes. Je dois les toucher. C'est bon ?
- Faites ce que vous devez. »

Il s'agenouilla et se mit au travail, testant d'abord l'élasticité des chaînes avec ses mains et calant ensuite un rebord du sommet de sa masse dans un des fermoirs pour faire levier. « Quel est cet endroit ? demanda-t-il. Un genre de temple démoniaque ? »
Eruth secoua la tête. « Je sais seulement ce que la Ténébreuse me dit. »
Il releva la tête. « Qui ?
- La Ténébreuse. Elle se tient juste derrière vous. »

Torens retint sa respiration en se tournant pour ne voir personne, rien que sa masse n'ait pas illuminé comme elle le faisait normalement pour la présence d'esprits ou d'engeances.

« Elle m'accompagne. J'ai appris votre nom grâce à elle. Et elle est celle qui m'a aidé à fuir... les gens comme vous. Les cathares. » La manière dont elle le dit, ou le cracha... Ce n'était pas comme si c'était son choix que de rejoindre les rangs des soldats d'Avacyn. Après avoir fui Hanweir, Torens avait fait son bout de chemin jusque la grande ville de Thraben. Peu après, il se trouva assiégé par zombies et skaabs avec la population de la ville. Quand il fut attrapé en train de fouiller des cadavres sur le champ de bataille, il eut la chance absolument débile d'être amené devant le commandant des Cavaliers de Gavonie. Quelqu'un de moins compréhensif qu'Odric l'aurait jeté en prison et laissé pourrir là. Mais lui, il lui offrit de glisser un mot à Thalia, nouvelle gardienne de Thraben. Tu es un survivant, lui avait dit Odric. L'Eglise a besoin d'hommes comme toi, surtout maintenant.
- Je suis à la retraite, répondit Torens.
- N'est-ce pas l'une de leurs armes saintes ?
- Ça l'était. Plus maintenant.
- Les cathares sont venus à Lambholt demander des informations de ma part, continua-t-il.
- De votre part ? Pourquoi ?
- Je fais des rêves. Visions de l'avenir, surtout par rapport à la mort imminente des autres. Quand ils ne pouvaient pas agir sur ce que je leur ai dit, ils m'ont traitée d'hérétique et ont monté le pilori sur la place du village. »

Torens avait entendu des histoires de soi-disant « prophètes fous », des gens qui prétendaient deviner l'avenir par la communion avec des dieux perdus, des esprits de la nature, ou des démons. Habituellement, ces âmes infortunées étaient condamnés à errer dans les chemins de traverse à lâcher des proclamations dans les airs. Plus récemment, ils avaient été parqués et menés dans des centres comme l'asile de la chaîne de Geier. Mais une exécution ? C'était le champ d'un groupe particulier de l'Église.

« Des inquisiteurs, grogna-t-il.
- Des sadiques dans des vêtements mimant la sainteté. J'ai fui dans les montagnes, et ici, la Ténébreuse est venue à moi. J'ai été capable de rester à un pas d'eux seulement grâce à elle.
- Elle ne vous a pas prévenue à propos des chasseurs. Cela n'est-il pas suspect ?
- Elle a prouvé sa loyauté envers moi. Contrairement à vous.
- C'est vrai, avoua-t-il en glissant les pieds d'Eruth hors de ses entraves. Vous êtes libre. Pouvez-vous marcher ? »

Eruth plaça un pied sur le sol, se pencha en avant, et se mit debout, pour tomber immédiatement après. Torens la saisit et la fit marcher autour de la pièce jusqu'à ce qu'elle sentît enfin ses jambes sous elle.

L'asseyant sur son lit, Torens la questionna :
« Le maître des diables. Où est-il ?
- La Ténébreuse dit qu'il est en bas. Loin en bas.
- Je n'ai rien à perdre à aller voir. Restez ici jusqu'à ce que je revienne.
- Je viens avec vous, Torens de Hanweir. Ma destinée est en bas, comme la vôtre.
- C'est juste Torens, d'accord ? Et non, vous ne venez pas parce que vous n'êtes pas en sécurité. » Il tenta de lui jeter un regard supérieur, mais elle lui rendit le regard glacé de qui a presque l'expérience de l'abysse. « Bien, dit-il en pressant l'épée d'Aleksandar dans les mains de la femme. Si vous êtes avec moi, vous aurez besoin de ça.
- Je ne suis pas une combattante.
- Je ne suis pas un héros. Mais il y a des fois où c'est notre tour.



[i]Torens pressa son cheval.
Presque arrivé, pensa-t-il.

Les routes qui reliaient Thraben au reste de la Gavonie avaient vu beaucoup de trafic ces derniers temps, et celles connectées à sa ville natale ne faisaient pas exception. Une semaine plus tôt, des réfugiés de divers endroits de la province avaient commencé à arriver par flux vers la ville haute. Le raisonnement était simple. Si un seul lieu devait être un port contre la folie qui s'était emparé du pays, le siège de l'Église devait l'être. Mais pour Torens, Thraben avait plutôt l'air d'un appât pour un piège à souris géant prêt à se déclencher, et il préférait ne pas avoir son cou entouré d'un nœud coulant.

De partir était doux-amer. Dans les trois ans pendant lesquels il fit partie des cathares, Torens s'était mis à beaucoup apprécier l'équipe hétéroclite que l'Église avait assemblée par désespoir : d'anciens condamnés, des hommes et des femmes rejetés de leur famille, des âmes perdues à la recherche d'un but. Mais dès qu'Odric fut démis de ses fonctions au Conseil lunarque, Torens perdit sa foi dans cette bannière. Cela ne changeait rien au respect qu'il avait pour ceux avec lesquels il avait servi, alors cela le gênait de déserter. Mais après avoir entendu les témoignages confus, incompréhensibles de ceux qui avaient fui Hanweir, il sut qu'il devait partir immédiatement.

Son départ vint au moment parfait. Certains réfugiés décrivaient un grand tremblement de terre qui engloutissait Hanweir. D'autres parlaient de leurs amis et voisins devenant des monstres sous leurs yeux. Et le plus fou, qu'il avait entendu de deux garçons tant exténués de leur voyage continu qu'ils pouvaient à peine parler : « Elle est partie. La ville entière marche. »

Torens ralentit son cheval tandis qu'il approchait de la rive du fleuve Kirch, le canal qui avait facilité la montée de Hanweir comme centre agricole de Gavonie. Dépassant de l'eau, se dressaient les mâts de plusieurs navires coulés, de même que des restes brisés des appontements qui formaient autrefois le quai. Il se rendit compte qu'il se tenait là où se tenaient autrefois les docks.

Ce n'est pas possible, pensa-t-il en menant son cheval le long du fleuve. Chaque pas s'accompagnait du bruit de succion de la terre imbibée, non d'eau mais d'une sorte de limon écœurant qui recouvrait ses bottes. Tout ce qui restait de la ville, c'était les formidables murs où de petites pièces de maçonnerie étaient aussi couvertes de cette même boue collante. Au-delà du champ de maçonnerie brisée se trouvait une fosse vide, comme si la ville entière, d'un coup d'un seul, avait été tirée de la terre.

La nausée le frappa, remuant ses entrailles comme le coup de tonnerre au-dessus de sa tête, une apocalypse en repos. Les instants suivants furent un flou d'ombre et de vent tandis qu'il traversait les rues fantomatiques imprimées dans sa mémoire, jusqu'à l'endroit où la baraque où il vivait avec sa famille se tenait auparavant.

Cet endroit, qu'il avait appelé sa maison.

Torens se leva et chercha le parchemin de cuir qu'un courrier lui avait apporté huit mois auparavant. Il n'avait pas à l'ouvrir pour savoir qui l'avait envoyé, et il n'avait pas eu envie de lire ce que l'émetteur y disait. Jusqu'à ce moment.


Torens,

Sais-tu à quel point il a été difficile de te trouver ? Je suis sûr que tu le sais. Mais je t'ai trouvé grâce à un ami dont la sœur est une Lame paroissiale à Thraben. Je n'aurais jamais pensé que tu sois un homme de foi, mais tu as toujours trouvé le moyen de me surprendre.

Mère ne va pas bien. Elle est tombée dans une profonde mélancolie dès ton départ, mais ces derniers temps, c'est pire encore. Elle refuse de quitter son lit, et cela fait des jours qu'elle n'a pas mangé. Cela lui ferait du bien de te revoir. Cela m'en ferait, aussi. C'est étrange de voir comment tu as trouvé ta foi, quand ce qui s'est passé récemment a pris la mienne. Peut-être que nous pourrions parler de ça quand nous serons ensemble.

Envoie-moi un mot quand tu prendras la route.

Ton frère,
Elamon.

La lettre lui tomba des mains, sur le sol. Le parchemin se teignit d'un vert malade au contact de la boue, il se désintégra en quelques secondes.

« Je suis là, » dit Torens au silence.




À la lumière de sa masse, Torens et Eruth suivirent l'inclination du sol jusqu'au plus bas dans le donjon, vers une seconde cour intérieure à l'arrière de la structure. Non, pas une cour – un cimetière, avec d'anciennes pierres tombales submergées par les ronces et un arbre noueux au centre, qui s'élevait comme une griffe jaillissant de la terre.

Au pied de l'arbre se trouvaient deux portes bâties dans la colline. Poussant avec difficulté les portes, Torens tendit sa masse à l'intérieur, pour révéler le décor macabre qui se trouvait au-delà : des os humains entassés comme des briques, des omoplates arrangées en rosaces et spirales, des crânes encastrés dans le mur comme des sentinelles aux yeux vides – un ossuaire, comme les autres à Thraben maintenus par les Concepteurs qui infusèrent les murs des tombes et des chapelles avec une magie protectrice.

Torens était devant. Bientôt, le hall d'os alignés se rapprochait en un passage onduleux où était entreposées des fioles en verre, chacune soutenue par un arrangement soigneux d'os de doigts humains. Une langue de feu azuré brûlait dans chaque fiole, les flammes contenant des images floues – visages, lieux, événements – comme une fantasmagorie fantomatique.

« Qu'est-ce ? demanda-t-il à Eruth.
- Des souvenirs, dit-elle en regardant de plus près. De peur, d'horreur, de douleur.
- Comment le savez-vous ? »

Eruth ne fournit aucune réponse. Les entrailles de Torens lui disaient qu'il le découvrirait bien assez tôt.

Ils se pressèrent, le passage toujours plus exigu avant d'ouvrir sur une chambre profonde et obscure, à peine éclairée des rangs de fioles du sol au plafond. Les diables étaient à genoux devant une plus grande figure debout sur une estrade à l'autre bout de la pièce. Ils gargouillaient, comme en transe. Ce devait être leur chef, le maître au cœur de tout ce qui s'était passé cette nuit. Un diable tenant l'une des fioles s'avança jusqu'à l'estrade, où il lança le contenant sur le sol. Un jet de flamme bleue s'éleva en spirales, illuminant le visage du maître.

Non. Ce n'était pas possible.

« Aleksandar ?
- Ce n'est pas lui, dit Eruth. C'est seulement son corps ; il y a quelque chose d'autre en lui. »

De la fumée s'élevait des fragments qui s'enroulait autour du corps frémissant d'Aleksandar. Les yeux fermés, Aleksandar convulsait et était secoué de spasmes, les doigts contractés et la mâchoire serrée. Une larme sortit de son œil alors qu'il regardait au loin et il sourit en rencontrant le regard de Torens.

« Elle a raison, » dit la voix impossiblement grave qui s'échappait des lèvres d'Aleksandar. Torens avait entendu parler d'entités qui pouvaient posséder corps et esprits – les démons bien sûr, mais certains esprits des morts anciens aussi. « Vous pouvez m'appeler Umbris. » Il fit un pas en arrière et se pencha au sol où un petit anneau de métal gravé de runes encerclait ses pieds. Torens n'était pas un sorcier, mais il pouvait deviner quel genre de magie était en jeu : un cercle de confinement d'acier froid prévenait la fuite.







« Laisse-le partir, ordonna Torens.
- Non. Il est à moi, c'est mon droit.
- Quel droit ?
- Celui des termes de mon emprisonnement établi par le sorcier Taivas il y a plus d'un siècle. Tandis que la population de Traublassen sommeille, je prends leurs peurs et leur peines pour que, quand vient le matin, ils se lèvent rassurés et frais. »
Rien de cela n'avait de sens pour Torens. « Dans quel but ?
- On n'est pas prêt pour une journée de dur travail si on est préoccupé par la peine ou la perte. Il est facile pour moi de les libérer de la douleur de leurs souvenirs, de purger leur passé. La stabilité est mère de docilité, après tout. En échange, la lignée de Taivas me fournit ce dont j'ai besoin.
- Des victimes, comprit Eruth.
- Ce sont mes tributs, rétorqua Umbris. On ne peut faire l'expérience du spectre de la douleur qu'à travers un corps, de chair et de sang, que je ne possède pas moi-même. Prenez le jeune Aleksandar. L'angoisse qu'il sentit en découvrant le cadavre de sa petite sœur est... délicieuse. Le cœur accélère, les poumons se serrent, les genoux tremblent, les yeux brûlent. C'est magnifique. J'ai voulu le sentir dès que je lui ai enlevé son souvenir d'elle. Il a bien des années de productivité devant lui, le bon gars. »
Juste nous trois... Aleksandar ne se souvenait pas de sa propre sœur ni de sa mort. Torens serra la poignée de sa masse. « Vous n'aviez pas le droit ! Je me fous de votre putain d'arrangement. Tu vas le laisser partir !
- Ta jolie arme peut certainement blesser son corps, mais sera peu d'effet sur moi et ne changera rien aux circonstances. Quel est le problème avec mes petits plaisirs ? Je mets fin à la souffrance ! N'est-ce pas une noble cause ?
- Ne crois pas un mot de ce qu'il dit, le prévint Eruth.
- Tu fais bien de parler ! S'exclama Umbris. Ne t'es-tu jamais demandé pourquoi je ne t'ai pas prise comme tribut ? Un autre t'a déjà prise, et je ne partage pas. Quels promesses mielleuses t'a donc fait ta Ténébreuse pour obtenir ton âme ?
- Elle m'a sauvée ! Quand tout le plan devenait fou, je serais aussi devenue folle, si elle ne m'était pas apparue. Tu mens !
- L'un de nous ment. » Umbris tordit le cou d'Aleksandar dans un angle qui n'était pas naturel pour regarder Torens. « T'a-t-elle parlé de ses rêves ? Ses rêves à propos de toi ? »
Désorienté, Torens s'éloigna d'Eruth. Elle avait dit que ses rêves contenaient des visions de l'avenir. Avait-elle vu son avenir ? « Pourquoi n'as-tu rien dit ? lui demanda-t-il.
- Ce... ce n'était pas le moment.
- Alors quand ?
- Elle ne te répondra pas, l'interrompit Umbris. Ses propres peurs restent insaisissables à mon espionnage grâce à sa passagère clandestine de malheur. Mais à travers elle, j'ai vu ce dont j'avais besoin à propos de toi. Une telle tragédie – l'avenir de ta ville. Et ton cher frère, Elamon...
- Ne dis plus jamais son nom ! rugit Torens.
- Et si je te disais que je peux t'aider ?
- Je te dirais que tu peux te le foutre au cul, cracha Torens. Je me fous de ta puissance. »
Umbris rit. « Ma puissance ? La puissance est un piège. Tu vois Vytas comme un homme prospère, un homme puissant. Et pourtant, depuis qu'il est enfant, ses rêves ont été consumés à se vouloir n'importe qui d'autre que lui – Quelque autre destin au-delà de l'héritage que Taivas avait prévu pour lui. Piégé par Taivas, comme Taivas m'a piégé ici. Vytas et moi... nous étions frères de souffrance, et nous avons compris à temps le merveilleux système que Taivas avait créé. Si élégant. Nous avions quelque chose de plus précieux que le pouvoir ou la liberté – nous avions un but ! Quel est ton but, Torens de Hanweir ? »

Torens sentit la force faiblir dans ses bras, la résolution dans son cœur s'évanouir une seconde avant de revenir un peu plus faible qu'auparavant.

« Ta douleur, dit Umbris. Tu la supprimes, et pourtant elle continue de t'entourer. Tu aurais pu ouvrir la missive de ton frère et revenir d'emblée à la maison. Mais à cause de ton ego, de ta vanité, tu ne l'as pas fait. Le fils infidèle... si seulement tu avais pu voir comme moi, avec les yeux de la foi, de la conviction et de la clarté. Moi, j'aurais vu le danger qui planait sur Hanweir. Moi, j'aurais fait partir ta famille – sans négociation. Moi, je les aurais tous sauvés plutôt que de survivre à peine.
- N'écoute pas, » lui rappela Eruth, mais sa voix avait l'air distante et creuse. Parce qu'Umbris avait raison. Torens était un survivant – l'un de ceux qui vivaient quand les autres connaissaient un destin funeste.
« Il n'est pas trop tard pour toi, Torens, continua Umbris. Laisse-moi retirer ta douleur et te donner un but. La fortune ? La gloire ? Être acclamé comme le héros qui vainc le mal au nom de la justice ? Tout cela est à prendre. Pendant ce temps, je garderais ton secret en sécurité, bien cachés, où personne ne le trouvera. Surtout toi.
- Où est le piège ?
- Nulle part. J'ai déjà mon tribut. Tout ce dont tu as besoin est de partir. » Umbris s'agenouilla et murmura à l'un des diables, qui disparut, en fumée. « La porte sera déverrouillée. Alors tu peux partir.
- Torens, répéta Eruth. Nous ne sommes pas des dieux. Nous ne sommes pas des seigneurs démons ni des anges. Nous ne pouvons pas façonner les fins de la divinité.
- J'aurais dû y être, dit-il. Elamon... Je voulais seulement qu'il ne dise pas qu'il avait raison. Je ne voulais entendre la liste de tout ce que j'avais mal fait. Etait-ce une bonne raison pour lui tourner le dos ? Leur tourner le dos à nous tous ?
- Les destinées ne peuvent être changées, seulement retardées ou accélérées, répondit-elle. Je le sais parce que j'ai essayé – des centaines de fois. Je préviens quelqu'un du danger, et un autre danger lui revient. J'orchestre les événements pour prévenir une situation, et les nouvelles circonstances se sont montrées encore plus mortelles. Quoique j'aie fait, le destin a toujours gagné.
- Alors, quel est mon destin – celui que tu as rêvé ?
- C'est à toi de le décider, répondit Eruth.
- C'est quoi cette foutue réponse ?
- Une réponse qui ne change rien, » lui expliqua Umbris.

Torens ne savait ce qu'il avait à faire ensuite. De voir Hanweir se fondre dans un oubli noir d'encre – ce n'était pas quelque chose qu'il aurait pu considérer comme possible. Et si Umbris disait la vérité ? S'il pouvait réécrire le passé dans l'esprit de Torens, est-ce que cela lui ouvrirait de nouveaux chemins ? Ou, comme les richesses promises à Vytas, était-ce un piège ? Il voulait tant qu'Elamon fût là pour lui dire ce qu'il avait à faire. Mais son frère n'était plus. Tout ce que Torens avait, c'était son instinct de survie, pour trouver des moyens peu orthodoxes de s'extirper de situations impossibles.

Alors c'est ce qu'il fit.

« Dis-moi ce que tu souhaites faire, dit Umbris.
- Je souhaite... que tu fermes ta gueule. » En un mouvement, il se précipita, levant la masse au-dessus de sa tête et frappant avec toute la force de son corps. Il croit qu'il vit sur le visage d'Aleksandar une expression de surprise, de confusion, et surtout de peur. Etait-ce Aleksandar qui luttait contre l'emprise d'Umbris ? Ou était-ce au tour d'Umbris d'avoir soi-même plutôt que de sucer les peurs des autres ?

Quoi qu'il en fût, Torens avait fait son choix. Quand le sommet de la masse frappa le cercle de confinement, l'impact fut comme un coup de tonnerre qui résonna à travers les catacombes et emplit la pièce d'une intense lumière bleue. Quand la lumière s'évanouit, Umbris avança devant les restes du cercle d'acier, les runes inscrites afin de le garder piégé n'étaient plus visibles.

« C'est inattendu, » reconnut Umbris.

Torens releva sa masse et se mit en position de combat, lorgnant les diables qui se rassemblaient autour de leur maître nouvellement libéré.

« Bien. Parce que j'ai une proposition à te faire.
- Je... t'écoute. »



Les cris de la place du village arrivaient même au-delà de la colline. Les commerçants, les forgerons et les brassiers brandissaient les outils de leur profession comme des armes contre ceux à qui ils avaient autrefois jugé fidélité. Vytas, dans une robe d'éclatants rouge et vert, aux côtés de Boris et d'une poignée de chasseurs, était encerclé.

Torens tourna le dos à cette scène en bas. « J'ignore tout de ce qui se passe.
- Tu as fait ce à quoi tu étais destiné, » dit Eruth. Pas de quoi le rassurer. La position de juge et de juré n'était pas de celles qui seyaient le plus à Torens, même si on pouvait justifier que Vytas et ceux qui vinrent avant lui avaient signé l'arrêt de mort de leur propre famille.
« Je pars. Il y a des affaires que je n'ai pas menées à bien en Gavonie, des choses auxquelles répondre. Je peux m'arrêter à Lambholt si tu veux. »
Eruth secoua la tête. « Je reste. Ces gens ont besoin d'être guidés. La Ténébreuse dit que c'est ma chance de trouver un nouveau départ.
- Tu restes ici ? Je suis sûr qu'un repas fait maison serait à propos.
- Lambholt n'est plus chez moi.
- Mais ta famille...
- Il y a quelques semaines, avant que les chasseurs me prennent, j'ai fait un rêve à propos de ma mère.
- Et ?
- Elle était heureuse. »

Devant eux, escaladant la colline, se trouvait Umbris dans le corps d'Aleksandar, un grand sourire sur son visage.

« C'est mieux que ce que j'aurais pu imaginer, dit-il. Les visions de peur et de douleur ne rendent pas justice aux affections du corps. » Umbris exsudait une aura obscure qui n'était pas perceptible dans sa prison souterraine. Mais dehors, dans la nuit noire, les effets de sa présence étaient évidents, de l'herbe brunissant sous ses pas au froid pénétrant qu'on sentait à proximité de lui.

« Souviens-toi de la fin de notre contrat, » dit Torens. Il savait qu'il n'était pas sage de faire confiance à la parole d'Umbris. Cependant, il avait rempli au moins une partie de ce qu'il avait promis. En bas dans l'ossuaire, les diables travaillaient dur à briser les réceptacles qui retenaient les mémoires des citoyens récoltées pendant des années. Umbris lui-même s'assurerait que les gens sachent que Vytas et les siens étaient responsables. Pour ma propre édification, avait dit Umbris.
« Il est temps, dit Umbris. J'ai tant envie de découvrir ce pays.







« La prochaine fois que nous nous verrons, je te descends, dit Torens. Je te le promets.
- Nous aurons bien des histoires à échanger ce jour-là, » rétorqua l'entité. Avec un dernier rictus, Umbris laissa le contrôle d'Aleksandar, qui s'effondra dans les bras de Torens.
« Monsieur ? demanda-t-il faiblement.
- Je suis là, » dit Torens en serrant fort contre lui Aleksandar, tandis que les facultés du garçon lui revenaient. Aleksandar commença à trembler alors que l'influence d'Umbris faiblissait, sa confusion aussi due à la conscience de l'existence de sa sœur, et puis sa mort. Torens le tenait toujours serré.
« Je suis là, » répéta-t-il. Il regarda en bas vers la foule sur la place du village. Les demandes de rétribution et de justice avaient été surpassées que la soif de sang. Un homme saisit une pierre, et la lança sur Vytas. Le vieil homme parvint à l'éviter, mais il ne put esquiver les deux suivantes. Torens ferma les yeux et imagina un autre jour, un autre rêve, que le chœur de pierres frappant la chair, que la pierre brisant les os.
« Je suis là. »

Alors c'était comment ?

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L'auteur

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—Psylocibe Ennabar, La cabane du prêcheur

Proposé par Dark Mogwaï le 19/06/2012

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